Le poids des mots, le choc des photos...
Bon.
Alors bon.
En coup de vent, histoire de dire que ce blog n'est pas entré en hibernation depuis quatre mois (...).
La photo fait mal.
Les déclarations aussi. Du lourd de chez lourd.
Elle avait commencé très fort en s'extasiant sur la rapidité de fonctionnement du système judiciaire chinois, oubliant que c'est justement ce que les défenseurs des droits de l'homme ont tendance à reprocher aux régimes totalitaires : le côté expéditif des procès...
Pendant toute la durée de son voyage, elle avait également soigneusement évité d'employer l'expression "droits de l'homme" assez peu apprécié (et usité) par les autorités chinoises. Elle disait "droit humains", c'est moins marqué, plus politiquement correct.
Et puis elle s'est mise à réciter un proverbe par jour. Comme Bruno Masure. Y'a pas meilleure référence pour une candidate à la présidence de la République. Ca crédibilise à mort.
Arrive le 7 janvier et, toute de blanc vêtue (alors que c'est la couleur du deuil en Chine, mais elle n'en était plus à une près), perchée en haut de la muraille de Chine, elle sort le désormais célèbre :
« Comme le disent les Chinois, qui n’est pas venu sur la grande muraille n’est pas un brave.
Qui va sur la grande muraille conquiert la bravitude. »
Bon.
Je veux bien que l'erreur soit humaine. Qu'à force d'entendre parler une langue étrangère, elle ait fini par sa planter. Mais là où ça a atteint des sommets, c'est quand, au PS, ils ont essayé de justifier sa connerie.
Dès le lendemain, on entendait par exemple l'un de ses directeurs de campagne expliquer qu'avec ce néologisme (qui n'en est pas un ; c'était juste une connerie, pas un calcul), elle avait voulu décrire la plénitude de la bravoure. On y croit à mort.
Elle, sereine, affirmait que ça démontre la vivacité de sa pensée.
Quant à Jack Lang, il déclarait, tranquille, que "l'inventivité sémantique fait partie de la capacité d'un candidat à parler une autre langue que la langue de bois" avant, semble-t-il, d'affirmer que le terme provenait du vocabulaire des jeux vidéos... Trop forts, à gauche !
Remarquez, à droite, ils se sont illustrés aussi. Dans un autre style, mais bon.
Au lieu de la laisser s'enliser, ils se sont empressés de se foutre d'elle. Et même si je reconnais que ça aurait été dûr de résister à la tentation, c'était gratuit et stupide.
Il y a cependant une exception dans les rangs de l'UMP : Edouard Balladur.
Aussi étonnant que cela puisse paraître, il a pris sa défense, déclarant qu'il était surpris par les réactions que cette bourde avait déclanchées avant d'ajouter que, quand Léopold Sédar Sanghar avait lâché le terme "Négritude", ça avait plutôt bien marché.
Alors bon.
Prendre la défense d'une adversaire politique, c'était tout à son honneur. Mais faut pas s'enflammer non-plus, pépère ! Dans Négritude, qui est un terme réfléchi et fort, il y a quand-même autrement plus de choses que dans "bravitude", qui n'est qu'une connerie involontaire.
Non mais c'est vrai : vous allez voir qu'au bout du compte, elle va réussir à devenir la première Prix Nobel de Littérature de l'Histoire à faire perdre une seconde fois le parti socialiste au profit de Le Pen au 1er tour...
P.s. en forme de petite-requète-de-rien-du-tout-mais-quand-même :
Tant que j'y suis, j'en profite pour vous demander un service : ne l'appelez plus par son prénom.
Qu'est ce que c'est que ce délire d'appeler un candidat à l'élection présidentielle par son prénom ? Est-ce qu'on dit "Nicolas" pour parler de Sarkozy ? Est-ce qu'on dit "Jacques" pour parler de Chirac ? Non !
Alors arrêtons de le faire pour elle : cette espèce de familiarité déplacée ne peut que lui rendre service.
Qu'on l'appelle "Royal", "Ségolène Royal", l'"autre", ou encore "la mouette rieuse" (qui est de loin mon préféré), comme certains membres de sa famille le font déjà (et je vous promets que c'est véridique) ! Mais pas par son prénom...